
L’explication de cette arrivée des ramoneurs vient à la suite de la panne du moteur dans l’histoire précédente.
Il était prévu de ne faire qu’un article et de conter ces deux histoires dans un même titre. Mais, comme je crains de manquer de sujets, ne sachant pas créer, il me faut des événements ; Dieu merci, le hasard fait bien les choses.
Une fois encore, le destin m’a servi. Les ramoneurs sont arrivés à point nommé pour me fournir de quoi écrire afin d’alimenter ma faconde.
Étant de nature laxiste, je ne suis pas obsédé par l’obligation qui nous intime à un ramonage de nos cheminées une fois par an.
Lors d’une conversation avec nos voisins, ils ont évoqué la visite prochaine des ramoneurs pour accomplir leur art dans les deux conduits servant à les chauffer. Nous avons profité de l’occasion pour leur demander l’adresse du professionnel, pensant que l’ouvrier pourrait, en passant, nous rendre le même service ; faisant d’une pierre deux coups : eux satisfaits, nous déchargés de notre obligation. Que nenni ! La société nous a fait part de l’impossibilité d’accéder à notre requête. Il nous fallait attendre le mois de janvier pour avoir la visite du professionnel.
Danièle s’est alors mise en quête de trouver une entreprise disponible. Un artisan a répondu favorablement, un accord a été conclu, et un rendez-vous pris.
Comme convenu, à l’heure dite, un homme est arrivé. Avant de descendre son matériel, il a demandé à voir l’objet de sa visite. En inspectant le travail à exécuter, il a relevé la tête d’un air catastrophé en m’annonçant l’impossibilité d’accomplir le ramonage : notre cheminée étant bistrée. Il ne pouvait ramoner sans un débistrage.
N’ayant jamais entendu ce mot et compte tenu de son air catastrophique, je l’ai questionné sur le pourquoi de la chose et la démarche à suivre pour remédier à l’état de fait.
Je vous laisse imaginer mon visage suite à sa réponse.
« Bien sûr, je peux faire ce travail, mais par contre ce n’est pas le même prix, il faut compter 500 euros. Mais comme c’est vous, je ne vous demanderai que 400 euros. »
Ma réticence n’a eu d’égale que ma lésinerie : je ne pouvais pas me délester d’une somme me paraissant énorme pour un travail hypothétique et inconnu. Le vieux méfiant que je suis l’a stoppé dans son élan à exécuter illico son désir de résoudre notre problème. Bien m’en a pris.
Le hasard est encore une fois passé par là. Danièle, souvenez-vous, avait téléphoné à la société choisie pour travailler chez nos voisins. Elle avait reçu comme réponse une impossibilité, question planning.
Le matin même de leur intervention, pour sûrement une bonne raison, l’entreprise a avisé leur client d’un changement d’horaire : de fin de matinée, elle ne pourrait intervenir qu’en début d’après-midi.
Catastrophe ! La famille avait prévu de partir en vacances sitôt le travail exécuté. Ils avaient loué pour les vacances une location au Pays basque. Avec les marmots en bas âge, ils ne pouvaient pas reporter le départ.
C’est pourquoi ils ont eu recours à ma disponibilité en me priant de bien vouloir leur rendre service : recevoir le ramoneur et l’assister le temps de l’exécution des travaux.
Comment refuser ? Mais le petit malin que je suis a illico cogité sur l’opportunité qui m’était offerte pour tirer profit de la situation à venir.
À l’arrivée du spécialiste, après nos politesses, je lui ai suggéré de bien vouloir, quand il aurait fini de ramoner les conduits pour lesquels il était venu œuvrer dans le nôtre.
— Un non, catégorique ! Appuyé d’un justificatif relatif à son emploi du temps.
Ne pouvant rester sur un échec, je me suis entendu dire :
— Attendez, attendez, quand nous aurons passé une heure ensemble, on en reparlera.
Je l’ai accompagné tout le temps de l’exécution du travail en le serinant de « Tout petit ramoneur, L’Étoile des neiges ».

Ma scie ne correspondait pas du tout au cliché du héros : il mesurait plus d’un mètre quatre-vingts et devait peser plus de cent kilogrammes. Jusque-là, mon histoire, si elle valait la peine d’être contée, serait déjà amusante.
La suite m’a réjoui de la plus belle des manières.
Ma prévision sur le changement de comportement de mon vis-à-vis s’est réalisée. Pour ce faire, il lui a fallu appeler le siège de son entreprise pour ne pas déroger à la conduite à suivre. Comme il discutait, je lui ai demandé de me passer son interlocutrice. Il faut croire à mon pouvoir de persuasion : malgré un refus dans un premier temps, elle a cédé suite à l’entretien.
Il a extrait la suie comme si de rien n’était. Je m’attendais à une mise en garde : souvenez-vous, le bistre et son coût ! Il a bien été question de bistre, son travail fini. Il a bien évoqué le bistre, mais a fait le nécessaire en me renseignant sur comment faire pour parfaire son travail, se débarrasser de ce dépôt.
Il me fallait acheter, dans un magasin de bricolage, un produit préconisé pour faire disparaître la pollution qu’est le bistre. Il m’a même indiqué le coût de ce produit : entre 25 et 30 euros.
Il ne m’en faut pas plus pour additionner les résultats des deux manigances, pour justifier de l’adage :
« Le premier argent qu’on gagne, c’est celui que nous n’avons pas dépensé. »

Bonjour Yves,
Merci pour cette anecdote savoureuse !
Je trouve que l’adage en conclusion devrait être adressé à nos députés et sénateur dont celuir de l’Allier Claude Malhuret qui saurait en faire bon usage !
Bon dimanche. Bertrand.
S’il est vraiment justifié par le colmatage excessif du conduit, un débistrage mécanique à 400 €, du fait des moyens et de l’outillage spécifique mis en œuvre, n’est pas arnaque comme tu sembles le croire.
Par contre dans cette même situation, un ramonage manuel au hérisson, suivi d’un simple débistrage chimique, est loin d’offrir les mêmes garanties vis à vis du bon service ultérieur et surtout de sa SECURITE dans le temps.
Décidément entre moteur et ramonage, demeure bien un un lien sacré avec ce hérisson, qui se complait dans les replis tortueux de ton morlingue. F