14 juin 2025

LES SUSPICIONS !

Comme toujours, allez savoir pourquoi, aujourd’hui, ces deux événements se rappellent à ma mémoire. Peu importe, ils sont là, alors pourquoi ne pas les conter, ce que je vais m’empresser de faire.

Pour la première, commençons par le décor : notre pièce sise au fond du jardin. Celle-ci est aménagée en salle de banquet médiéval pour recevoir une vingtaine de convives, toute une bande de copains composée de cousins et d’amis, les relations en rapport avec Bénédicte et Arnault.

Cette réunion avait pour thème un festin se déroulant au temps des chevaliers de la table ronde, époque chère à Bénédicte, comme il nous le sera prouvé des années plus tard quand elle créera sa troupe de théâtre, LES PASSEURS DE LÉGENDES.

Il fallait, pour la véracité du jeu de rôle, outre manger sur des tranches de pains en guise d’assiettes, des verres en étain. C’est grâce à ces gobelets ou par leur faute, en tout cas, qu’ils sont la cause de mon histoire.

Le lendemain de cette agape, après avoir remis toute la vaisselle dans l’état d’avant cette ripaille, en recomptant ces fameux verres en étain qui représentaient à cette époque une certaine valeur, nous constatons qu’il en manquait un.

Grand chambardement pour retrouver l’objet manquant, d’autant plus qu’il appartenait à Françoise une de mes sœurs, maman de trois garçons dont deux de ces fils participaient à cette fête.

Après avoir cherché dans les poubelles, partout où nous aurions pu retrouver cet accessoire, et suite à toutes ces recherches vaines, il a bien fallu nous rendre à l’évidence d’une dernière réflexion qui nous chagrinait.

Notre déduction, pas facile à admettre : un des convives s’était transformé en voleur. Connaissant tellement bien tous les invités, il ne nous est même pas venu à l’idée de nommer un coupable parmi cette assistance.

Quand j’ai formulé ma pensée à nos deux enfants, j’ai expliqué que ce personnage ne pouvait être nommé que voleur, n’ayant pas peur des mots, je ne trouvais pas d’autres adjectifs.

Notre bévue a pris fin dès l’instant où il nous a fallu rendre des comptes à Françoise en lui annonçant la perte de son verre, et de là, la vérité a pris corps en balayant la suspicion malsaine qui avait germé dans nos cerveaux : il s’est avéré que nous avions emprunté onze verres, les seuls qu’elle possédait.

Pourquoi j’ai toujours gardé en mémoire ce fait, qui se présente comme une banalité, une simple bévue, une erreur de présomption anticipée ? La culpabilité imaginaire dérangeante, dans mon esprit.

Une autre histoire dans le même genre, mais celle-ci à mes dépens, si j’ose dire !

Je ne vais pas recommencer mon histoire de voisinage avec mon ami Michel Villedieu, l’ancien menuisier. Une simple précision pour résumer nos relations : il faut savoir que mes désirs étaient des ordres pour lui, il anticipait même mes besoins. Quand il me voyait bricoler, il devinait ce dont j’allais avoir besoin, tant en morceaux de bois qu’en quincaillerie ou en outils. Il s’empressait de faire le nécessaire silencieusement en revenant avec les bras ou les mains chargés de ce dont j’avais besoin.

Nos rencontres étaient toujours empreintes de sympathie et de bonhomie. Mais un jour, changement d’attitude, mon ami, en me disant bonjour, je remarque un rictus que je ne connaissais pas s’afficher sur son visage, un manque de sérénité. Quand je constate cet état de fait, je n’y prête pas plus attention que ça.

Je ne comprenais pas. J’étais loin de penser que j’étais la cause de cette « sale tronche », donc pour moi rien ne changeait. Je ne variai pas de comportement ; comme toujours, mon dialogue ironique ponctuait nos conversations, et ceci pendant deux ou trois jours.

Jusqu’au moment où il m’avoua qu’il avait quelque chose à me dire et qu’il lui en coûtait de m’avouer ce message, sa diction était des plus graves.

— Tu ne peux pas savoir comment je suis embêté, mais il faut que je t’avoue ce qui me tracasse : tu as dû me prendre une boîte de pointes. Ces clous, je ne les trouve nulle part ailleurs, je me suis empressé de les acheter pour une fois qu’ils étaient en vente sur un étal à Clermont-Ferrand, la cité Auvergnate où réside son frère.

Ce paquet, je l’ai posé dans un endroit où personne n’est venu, que toi et moi. Cet état de fait relaté, j’en déduis, comme ce n’est pas moi, que ce ne peut être que toi qui les aies subtilisés.

Pour réponse, un grand éclat de rire de ma part en lui rétorquant.

— Si tu crois que je me travestirai en voleur pour une boîte de clous, sachant très bien qu’en cas de besoin, tu t’empresserais de combler mes désirs… Ceci dit, ta ferraille se cache, je ne sais où elle est, mais elle se trouve là, à l’endroit où tu l’as déposée. Je suis sûr et certain que tu vas la retrouver. Je ne connais pas cet endroit, mais je suis certain de ma prédiction. Sa nouvelle attitude suite à ma mise au point : il a retrouvé son naturel envers ma personne.

Bien lui en a pris, car, comme prévu, un matin, il m’a annoncé que l’objet du délit, il l’avait retrouvé dans un endroit oublié.

Ces deux présomptions de vols illusoires m’ont permis de prendre conscience de la fragilité des convictions primaires, celles qui nous viennent de nos jugements très subjectifs et de nos premières déductions les plus faciles.

SOMMES-NOUS PAS, AU MOIS DE JUIN 2025, LES CERISES DU VOISIN !

LES CERISES DU VOISIN

1 Comment

  • Ôte-moi d’un doute ! Avant que les verres ne soient en verre, comment les nommait-on ?? Fussent-ils d’étain, pouvait-on dire alors : avoir un étain dans le nez ?? Ou gobelet même s’ils ne servaient pas à boire que du lait ?? Coupe de céramique, de bronze ou d’albâtre pour les plus fortunés et les plus costaux, dont le culte du biceps était lié à l’étanchement de leur soif !! « Ci-boire » de par sa forme et son nom aurait bien fait l’affaire, mais d’ordinaire sa fonction semblait autrement plus sacrée !! Bof, peu importe et à la bonne tienne ! Flute et manque de bol, même si ce n’est pas ta tasse de thé !!
    Entre clous et pointes, là les mecs pour le pro du bâtiment, ça ne rigole plus, qu’elle soit plate ou bombée gardons la tête froide et sur les épaules si nous ne voulons pas nous faire pointer du doigt, river le clou et clouer illico au pilori ! Par contre il est bon de savoir que sous le geste expert d’un bon Compagnon, l’un et l’autre restent toujours droits, raides et stoïques sous le marteau !! FR

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