8 juillet 2023

QUART D’HEURE RABELAISIEN

Mon absence des bons dimanches est due à un aléa de l’informatique, mon technicien ne pouvant se libérer, j’ai attendu son retour pour pianoter de nouveau.

Contraire à ce que j’aurais pu penser, j’ai très bien vécu cette diversion.

Revenons à mes dimanches.

Cette incitation à lire l’histoire, empruntée à un illustre inconnu, n’a pour but que de vous inviter à lire ce qui vient en complément : comment sans le savoir, j’ai pratiqué la méthode Rabelaisienne.

Après être resté à peine six mois à Rome, Rabelais fut rappelé en France, peut-être pour aller porter au roi quelque communication importante de l’ambassadeur. En arrivant à Lyon, il fut forcé de s’arrêter dans une hôtellerie faute d’argent pour continuer sa route ; et comme il ne voulait pas se faire connaître de peur de compromettre le succès de sa mission, il imagina le stratagème suivant pour sortir d’embarras :

Il se déguisa de manière à n’être reconnu de personne, et il fit avertir les principaux médecins de la ville qu’un docteur de distinction, au retour de longs voyages, souhaitait leur faire part de ses observations : la curiosité lui amena un nombreux auditoire, devant lequel il se présenta vêtu singulièrement, et parla longtemps, en contrefaisant sa voix, sur les questions les plus ardues de la médecine.

On l’écoutait avec stupéfaction quand tout à coup, il se recueille, prend un air mystérieux, ferme lui-même toutes les portes, et annonce aux assistants qu’il va leur révéler son secret. L’attention redouble. « Voici, leur dit-il, un poison très subtil que je suis allé chercher en Italie pour vous délivrer du roi et de ses enfants. Oui, je le destine à ce tyran, qui boit le sang du peuple et qui dévore la France. »

À ces mots, on se regarde en silence, on se lève, et on se retire ; Rabelais est abandonné de tous. Mais peu d’instants après, les magistrats de la ville font cerner l’hôtellerie, on se saisit du prétendu empoisonneur, on l’enferme dans une litière, et on l’emmène à Paris sous bonne escorte. Pendant la route, il est hébergé aux frais de la ville de Lyon ; on le traite magnifiquement comme un prisonnier de distinction, et il arrive enfin frais et dispos à sa destination.

Le quart d’heure de Rabelais au Palais-Royal. Lithographie du XIXe siècle

François Ier est prévenu de l’arrestation d’un grand criminel, il veut le voir ; on conduit devant lui Rabelais, qui a repris son visage et sa voix ordinaire. François Ier sourit en l’apercevant. « C’est bien fait à vous, dit-il, en se tournant vers les notables de Lyon, qui avaient suivi leur capture ; ce m’est une preuve que vous n’avez pas peu de sollicitude pour la conservation de notre vie ; mais je n’aurais jamais soupçonné d’une méchante entreprise le bonhomme Rabelais. » Là-dessus, il congédia très gracieusement les Lyonnais confondus, et retint à souper Rabelais, qui but largement à la santé du roi et à la bonne ville de Lyon.

Or, ce serait, par allusion à l’embarras financier où Rabelais se trouva dans cette ville, que l’on a fait la locution proverbiale « le quart d’heure de Rabelais« , pour désigner le moment où il faut payer la dépense d’une consommation quelconque.

COMMENT CETTE HISTOIRE A RESSURGI DANS MA TÊTE

Suite à un bon repas dans un restaurant cher à mon cœur (chez Nono, un personnage haut en couleur qui aura droit à son article dans un futur proche), en compagnie d’un ami, il se reconnaîtra pour la bonne raison, bien qu’il y ait plus de 20 ans que cet événement a eu lieu.

Ce personnage ne manque jamais une occasion de me remémorer ce moment qui a fait, le pourquoi de notre histoire.

À la fin du repas, j’ai quitté la table quelques instants pour satisfaire un besoin naturel. Que n’ai-je pas fait là, le tavernier est venu avec sa note pour le règlement, compte tenu de mon absence, J.Y.M. a réglé l’addition.

Quelle aubaine pour moi ! Pour lui, c’est autre chose, il me suspecte, tout du moins le dit-il à tout vent, en affirmant que ce besoin m’a servi de prétexte à mon escapade fortuite.

Je suis heureux d’apprendre à la veille de mes 80 ans d’être un digne descendant de la « Rabelaisie ».

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