Je vais y aller encore une fois avec un coup de hasard. Il m’arrive fréquemment de rendre visite à un ami résidant en banlieue de Tours. Ce mardi matin, Jean-Lou (un personnage qui je pense a déjà tenu un rôle dans mes histoires) m’informe d’un problème, sa cave avait été vraisemblablement la cible de voleurs. Il ne pouvait plus ouvrir la porte de celle-ci, il pensait à juste titre, suivant les dires des voisins, que bon nombre de résidences du quartier avaient été cambriolées dernièrement.
Il avait prévu de remédier à son problème en ayant préparé les outils qu’il jugeait nécessaires pour réparer les dégâts occasionnés par les pillards. Comme toujours, le sans-gêne que je suis s’est proposé pour lui tenir compagnie en tant qu’assistant serrurier. Arrivé devant l’objet en panne, il m’a laissé pour aller chercher la clef. Le temps de son absence, j’ai trafiqué avec ses outils la serrure tant et si bien qu’à son retour, il m’a tendu la clef qui, suite à son introduction dans le fermoir, le quart de tour opéré, le pêne a joué son rôle en donnant le libre accès à ce mini-chai.
Dans ce local, sont entreposés des alcools, dont deux tonnelets hérités de ses oncles et contenants du Calvados de plus de 15 ans. Ces esprits-de-vins sont conservés dans des futs en chênes, entreposés à l’abri des variations météorologiques, ce qui pourrait paraître normal dans une cave creusée à même le rocher. Je dis « paraître », car pour le cas qui nous concerne, il aurait mieux valu que ces élixirs, afin de conserver tous leurs arômes, soient stockés dans des récipients non-putrescibles tels du gré ou du verre.
Les futs en chêne comme contenant sont vraisemblablement parfaits dans les chais où l’hydrométrie est des moindres. Ce qui n’est pas le cas dans notre affaire, ces tonnelets sont recouverts d’une moisissure de la plus belle dans le genre, générant des conséquences irréparables avant de transvaser ses alcools.
Mon ami, du bout de sa pipette, m’a humidifié la paume de la main, afin que je lui donne mon avis après avoir lapé. Je ne pouvais lui annoncer qu’une mauvaise nouvelle : ses produits étaient éventés. Il lui était impossible de servir à ses hôtes, il ne lui restait plus, s’il ne voulait pas les jeter dans le caniveau, sans servir pour les plats cuisinés et la pâtisserie, entre autres, aromatiser la pâte à crêpes ; suite à cette déduction, nous nous sommes quittés.
Sur le chemin du retour, je me suis dit, si ton ami ne veut pas perdre irrémédiablement le goût de ses contenants, il te faut l’avertir de transvaser au plus vite ses alcools dans des récipients en verres : telles les bonbonnes Dame-jeanne. Pour faire suite à ma réflexion, je m’empresse de téléphoner à mon ami pour lui faire partager mon idée.
Cette histoire aurait pu en rester là. Eh bien, non ! Pour mon plus grand bonheur, il y a une suite qui fait que je suis encore une fois à raconter deux histoires relatives à ces invraisemblances qui ont imagé mes souvenirs.
Quand j’ai évoqué la Dame-Jeanne à mon ami, j’étais loin de me douter que le surlendemain, en allant au marché, je vivrai un de ces instants des plus agréables comme je les aime, vous savez, ceux qui me permettent de compléter (mes histoires) dans ma collection, des heureux hasards vécus tout le long de ma vie passée.
Je pense avoir déjà raconté le plaisir que je prends en déambulant sur les marchés de quartiers, ayant la possibilité de m’y rendre à pied six jours sur sept, seul le lundi, dans la ville de Tours, sur les lieux de commerces en plein air. Du fait de cette fréquentation assidue, je tutoie beaucoup de commerçantes et de commerçants.
Un jeudi matin, ma déambulation se déroule place de Strasbourg. Devant un maraîcher du Saumurois, avec lequel je joute verbalement, pour le plus grand plaisir des clients faisant la queue dans la file d’attente, allez savoir pourquoi, ce matin du 28 décembre 2023, soit le surlendemain de la recommandation faite à mon ami de changer les contenants en bois du calva et du cognac pour des récipients en minéral tel du verre ou du gré.
En arrivant devant l’étal de mon marchand de radis, d’oignons… Sous les tréteaux supportant les tables recouvertes des produits récoltés dans ses jardins, une Dame-jeanne s’offrait à ma vue.
Après mon bonjour, j’interpelle le commerçant en lui demandant pourquoi il avait cet objet anachronique dans son fatras. Comme réponse, il m’explique qu’une cliente lui avait déposé ce matin pour s’en débarrasser, car elle avait vraisemblablement discerné en lui, un certain sens de la récupération, compte tenu de son attitude en tant que voisin de la poubelle réservée aux objets recyclables. J’ai tout de suite eu une pensée pour mon ami à qui cette bombonne serait la bienvenue, c’est pourquoi je partage mon raisonnement avec à mon vis-à-vis en deux mots et sans arrière-pensées : malgré ce que vont penser mes détracteurs, ils se reconnaîtront.
Suite à cette réflexion, je le quitte pour me rendre à la boulangerie afin d’acquérir notre pain quotidien. En revenant avec ma baguette sous le bras, arrivé à la hauteur du « chiffonnier d’occasion », je suis témoin de son occupation : il était en train de nouer une ficelle autour du goulot de la bombonne. Tout étonné, je lui demande le pourquoi de ce ligotage en lui précisant qu’il serait bien étonnant que l’objet en question s’échappe.
Comme réponse :
– J’agis comme cela pour que tu ne la casses pas en la ramenant chez toi.
Le fantaisiste égocentrique que je suis n’a pu faire autrement que de ramener à lui ce don, en tant qu’un hasard, un heureux événement.
Un concours de circonstances va faire naître une autre histoire de hasard qui va agrémenter mes récits, il y a plus de quarante ans, dans un futur proche.
😎 Sacré Yves Duhard, des hasards bizarres que tu narres sans fard, brandis tels étendards, mon esprit pendard et scribouillard s’empare et par racontars vasouillards dès le départ, banalise le brouillard de son vantard colin-maillard.
Hors tout canular, en plus grosse part, la vie de chiard à vieillard (du calbar au corbillard) d’un peinard zigomar, de ces hasards paillards et sans charre, dépendent les trois quart de ses avatars.
Imagine les milliards de gniards nés depuis César ou les Tartares, à Zanzibar, Madagascar ou aux Baléares et toi Yves Duhard, petit moutard franchouillard, né à l’époque des maquisards, au pays de Ronsard, serait favori veinard à l’égard du hasard ?? En toute connivence, je me marre !! FR 😊