4 juin 2022

LES COULEMELLES ET LES ORONGES

Rien d’extraordinaire, alors pourquoi écrire sinon me faire plaisir en tapotant sur mon clavier, je revis des instants de plénitudes. J’ai eu la chance, après moult manœuvres, de forcer les grilles en fer forgé d’une propriété, celle du château de bois Renault sis à Ballan-Miré, commune en banlieue de Tours (à venir dans une autre histoire, les jacinthes des bois).

Avec l’autorisation de la gérante du domaine, j’ai pu m’adonner à la recherche des champignons dans le parc de la propriété. Un hic cette année, les cèpes et beaucoup d’autres variétés ont fait défaut, par contre les coulemelles se sont épanouies de belle manière, il y en avait à profusion.

Devant cette situation de surabondance, contrairement à mon habitude, je cueille de quoi rissoler une ou deux cuisines, laissant pour d’autres ramasseurs. À l’occasion, je les guide afin qu’ils puissent faire comme moi, une provision de ces lépiotes.

Mais dans ma situation de privilégié, étant le seul à pouvoir prospecter sous cette frondaison, je me rongeais le sang en présumant la future putréfaction de ces nez de chats. Ne voulant pas être indifférent à ce gâchis, j’ai glané le maximum de ces champignons.

Cette abondante récolte m’a permis de faire plaisir à une trentaine de personnes de notre voisinage, des néophytes en mycologie.

Dans ma situation d’approvisionneur en mets complètement inconnus, les destinataires m’ont fait confiance en ingérant ces champignons.

Comme toujours, j’ai fabulé en me racontant une histoire, et si j’avais fait une erreur dans cette cueillette, le lendemain matin tous ces dégustateurs d’un soir se seraient retrouvé dans un centre de désintoxication, j’aurai fait la une des journaux : « À TOURS, UN RAMASSEUR DE CHAMPIGNONS A EMPOISONNÉ UN BON NOMBRE DE SES VOISINS« .

Il est vraisemblable qu’il ne m’aurait pas été donné l’occasion, quelques années plus tard de récidiver avec une cueillette spécifique dans notre région. Ce savoir, je le dois à un cousin du Périgord, il paraîtrait que dans cette région, il n’est pas rare d’en dénicher dans les sous-bois.

LES AMANITES DES CÉSARS OU ORONGES

La chance ne m’a souri que 3 ou 4 fois dans ma vie de cueilleur. Entre les truffes et ces oronges, ma satisfaction n’a d’égale que mon orgueil. En plus de 50 ans d’errance sous les couverts et dans les champs, rien que ces moments de rencontres ont fait de moi un quidam des plus heureux.

Ce n’était pas la première fois que cette perspective d’empoisonnement de mes contemporains aurait pu se produire.

Précédemment, après avoir cueilli des oronges, le plus extraordinaire des champignons cuit ou cru peu importe, pour moi la meilleure façon de les déguster, c’est cru.

La récolte d’un après-midi, d’une belle abondance, m’a permis de flagorner dans mes relations amicales, dans mon voisinage, et même plus loin.

Je me suis promené avec mon panier chargé d’oronges, muni de mon couteau. À chaque rencontre, je donnais à goûter une portion de ce mets, comme se font les dégustations de fromages sur les marchés, tels des bonbons.

Comme pour l’histoire précédente, le lendemain matin, la presse aura des gros titres : « UN RAMASSEUR DE CHAMPIGNONS A EMPOISONNÉ UN BON NOMBRE DE SES VOISINS« .

Il est certain, dans l’hypothèse où mes dégustateurs de coulemelles feraient passer de vie à trépas, je n’aurais pas réitéré dans mon orgueil.

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